Insolite...

Les poumons ne servent qu'à la respiration; 

VRAI... En règle générale. Mais pas toujours!

Les crapauds de l'espèce Bombina orientalis ne possèdent pas de tympan et utilisent leurs poumons pour ... entendre.

Les ondes passent sans doute par la bouche et résonnent ensuite dans les poumons pour traverser divers tissus mous et atteindre les oreilles.

 

Le crapaud qui devint clone...

En 1952, deux chercheurs américains, Robert Briggs et Thomas King, tentent de cloner le crapaud (rana pipiens). Au contraire de la plupart des mammifères, cet animal semble alors particulièrement propice aux expérimentations puisque ses oeufs, atteignant près de 2mm., sont visibles à l'oeil nu et que l'ensemble de son processus embryonnaire peut être observé à l'air libre.

Au cours de leurs expériences, Briggs et King s'aperçoivent que la réussite de l'opération dépend de l'activation de l'ovocyte: il faut piquer légèrement ce dernier pour déclencher les réactions biochimiques propices à la réception du noyau que l'on veut y placer. Cette piqûre joue en fait le même rôle que la pénétration du spermatozoïde lors d'une fécondation classique: l'ovocyte "comprend" alors que la fécondation vient de s'opérer et le mécanisme de l'embryogénèse peut commencer.

La réussite des deux Américains est complète: 99% des ovocytes énucléés, activés par piqûre et placés dans une solution permettant leur survie ex vivo, acceptent le transfert nucléaire. Le noyau est quant à lui prélevé sur des cellules embryonnaires de crapaud au stade blastula (c'est à dire lorsque l'embryon n'est qu'un amas de quelques dizaines de cellules encore indifférenciées et totipotentes). Sur 197 transferts opérés, 104 fonctionnent et démarrent le processus de croissance embryonnaire, 35 deviennent des embryons et 27 des têtards. Mais aucun de survit assez longtemps pour donner naissance à un adulte. Briggs et King ont néanmoins réussi leur pari: le noyau de cellules non sexuelles, c'est à dire non programmées spécifiquement pour la reproduction, peut se développer en embryon.

L'expérience des deux savants américains a utilisé des noyaux prélevés à un stade très précoce du développement embryonnaire. La question que se pose la communauté scientifique est alors la suivante: jusqu'à quel degré de différenciation les cellules conservent-elles la capacité de se reprogrammer en embryon ? On sait en effet que l'embryon se développe par spécialisation des cellules qui le composent et qui constituent peu à peu les organes et les tissus de l'individu.

Noyau: partie de la cellule qui contient la part la plus importante du génome de l'individu (ADN nucléaire).

Cytoplasme: partie de la cellule enveloppée par une membrane et qui contient les organites assurant le fonctionnement de la cellule, notamment les mitochondries dotés de leur propre génome (ADN mitochondrial).

Ovocyte: cellule germinale (sexuelle) femelle. L'ovocyte en phase II (maturation) est appelé ovule.

In vivo / In vitro: expériences qui se tiennent dans leur milieu naturel (in vivo) ou qui sont reproduits en laboratoire (in vitro ou ex vivo).

Cycle cellulaire: la vie de la cellule connaît plusieurs phases. La phase M (pour mitose) correspond à la division de la cellule en deux cellules-filles. La phase G1 est une phase de repos qui suit la mitose. Elle est suivie de la phase S (pour synthèse)durant laquelle l'ADN des chromosomes se réplique. La phase G2 est une nouvelle phase de repos qui précède la mitose. La G0 utilisée pour le clonage, est un état stationnaire adopté par une cellule qui cesse de se diviser.

 Dossier BIOsciences N°1,

(Novembre - Janvier 2000)

Certains amphibiens perçoivent les sons par les voies respiratoires.

Les salamandres entendent un drôle d'air...

"Parlez plus fort, j'ai les poumons bouchés". Ainsi crient les salamandres entre les mains de Thomas Hetherington, professeur à l'université de l'Ohio. Spécialiste du système auditif des grenouilles et autres amphibiens, le chercheur vient de démontrer, au terme d'une série d'expériences étonnantes publiées dans le Journal of Comparative Physiology que l'animal favori de François Ier entend comme il respire. Il perçoit les sons par les voies...respiratoires.

Et il n'est pas le seul, comme l'a découvert le chercheur américain: des grenouilles, des crapauds, mais aussi des lézards lesquels appartiennent non plus à la famille des amphibiens mais des reptiles, utilisent leurs poumons pour capter les signaux sonores. "Ce système d'audition est sans doute bien plus répandu qu'on ne le pense chez les vertébrés", avertit le chercheur qui ajoute, surpris par l'emprise du poumon sur l'audition d'une telle variété d'animaux: "l'audition pulmonaire pourrait être le mécanisme originel d'audition des premiers animaux terrestres."

Etrange genèse que Hertherington a mise en évidence en auscultant diverses espèces de salamandres capturées par ses soins. Il a choisi ces bêtes là parce qu'elles n'ont pas d'oreille moyenne, cette cavité où siège normalement le tympan, membrane qui vibre sous la pression des sons. De fait, ces animaux sont réputés "sans ouïe". Mais alors, s'ils n'entendent pas, pourquoi donc sont ils dotés d'une oreille interne bien développée ?

Les cellules ciliées qui tapissent cet organe transforment les vibrations en influx nerveux envoyé au cerveau. Chez les vertébrés supérieurs, le tympan de l'oreille moyenne joue les messagers, tambour battant. Chez les salamandres, c'est la paroi pulmonaire, a découvert Thomas Hertherington.

Le chercheur a soumis ces fragiles amphibiens à des sons de diverses fréquences, prenant le soin de les mouiller en permanence pour éviter leur dessèchement. Il a mesuré avec un rayon laser l'impact de ces sons sur leur flanc au niveau des poumons. Et constaté que la peau vibre. En revanche, lorsqu'il a rempli les poumons de ces bêtes d'eau oxygénée -ce qui leur permet de respirer-, la peau n'a plus vibré. Preuve que les vibrations enregistrées en surface sont bien celles des sons entrant dans les poumons.

Ainsi, preuve est faite que la salamandre entend... par la bouche. Comme la grenouille, le lézard et certains serpents a constaté Hetherington qui résume le circuit de cette audition pulmonaire: les sons entrent avec l'air, font vibrer les poumons, les vibrations atteignent l'oreille interne, et de là le cerveau. L'oreille interne est frappée de l'intérieur par un "flux inverse" des sons, souligne le biologiste. Or, les poissons qui utilisent les ouïes -leurs capteurs d'oxygène- comme récepteurs des sons subaquatiques connaissent le même renversement de flux. "La respiration pulmonaire est peut être le vestige d'un système auditif aquatique", écrit le chercheur. Témoin de cet âge des eaux, la salamandre... emblème de la vie sortant du feu.

Corinne Bensimon,

(08.03.2002)

Le TGV Med, ami des tritons.

L'impact du train sur l'environnement a fait l'objet d'une étude.

Déjà menacé, le pélobate cultripède, un amphibien qui habite les mares du val de Durance, paraît en voie d'extinction. (...) Malgré l'aménagement d'un plan d'eau, le pélobate cultripède est "probablement en voie d'extinction" . "Cela n'est pas notre faute", affirment RFF et SNCF. Les poissons déversés par les pêcheurs ont mangé ses oeufs. Les écologues du Conservatoire études des écosystèmes de Provence (CEEP) ont en revanche découvert dans le lit de la Durance un triton palmé non signalé dans la région. Au dernier inventaire, ils étaient trois. (...)

Catherine Bernard,

(06.02.2003)

Les phéromones chez les batraciens
On ne connaissait à ce jour qu'un seul vertébré émettant des phéromones, substance chimique qui favorise l'attraction sexuelle.

Il y en a désormais au moins trois. En septembre 1999, une phéromone émise par une espèce de salamandre terrestre, qui rend la femelle plus réceptive à l'accouplement, a été isolée par Stéphanie Rollmann, de l'Université de Chicago, et ses collègues. Les chercheurs ont découvert la substance dans la glande submandibulaire d'une espèce de salamandre terrestre américaine, Plethodon jordani, et ont également isolé le gène codant pour cette protéine simple. Selon les chercheurs, ce gène est similaire, quoique non identique, à l'un des gènes humains. Quelques semaines plus tard, c'est une phéromone sexuelle hydrosoluble qui a été découverte et caractérisée chez une espèce de grenouille mâle par des chercheurs australiens.

Cette phéromone, un peptide qu'ils ont dénommé splendiphérine, est émise par des glandes situées à l'avant et à l'arrière de la tête. En étudiant les sécrétions de ces glandes tous les mois pendant trois ans, les chercheurs ont découvert que la splendiphérine était produite par les mâles en quantité dix fois supérieure de janvier à mars, période de reproduction, que pendant le reste de l'année. Selon les chercheurs, les phéromones ont également une grande influence chez les humains: les femmes qui passent de longs moments ensemble finissent par voir leurs menstruations synchronisées (phénomène vérifié dans les écoles pour filles et les couvents) et une femme qui fréquente souvent le même homme voit la régularité de ses menstruations augmenter, ce qui facilite la conception.

Dossier BIOsciences N°2.

Salamandre sans poumons

Une salamandre sans poumons a été observée, pour la première fois en Asie, en Corée du Sud, par une équipe de naturalistes sud-coréens et américains. Cet amphibien de 40mm de long, qui a été dénommé Karsenia koreana, du nom de son découvreur Stephen Karsen, biologiste de l'Illinois installé en Corée du Sud, est dans ses apparences similaire à sa cousine américaine. Elle est de couleur noire avec une bande rouge ou jaune foncé sur le dos. Elle appartient à la famille des salamandres sans poumons, les pléthodontidés, qui respirent au travers de leur peau, toujours humide. Ces salamandres constituent 70% des 535 espèces actuellement connues. Cette salamandre, indiquent David Wake, de l'Université de Californie à Berkeley, et ses collègues, a été trouvée en 2003. Depuis cette année-là, elle a été localisée en seize endroits, dans trois provinces sud-coréennes différentes. Quelque 99% des pléthodontidés déjà découverts vivent en Amérique du nord, en Amérique centrale, en Italie continentale et en Sardaigne. Le fait qu'on en ait trouvé en Asie peut laisser penser que cette famille était présente en Asie, en Europe comme en Amérique il y a cinquante à cent millions d'années, estiment les chercheurs. De très nombreuses espèces d'amphibiens continuent d'être découverts, et en augmentation de 40% au cours des vingt dernières années. Récemment, une cinquantaine d'espèces de grenouilles jusqu'ici inconnues ont été trouvées au Sri Lanka.

Dossier BIOsciences N°24.

 

La salamandre toujours égale à elle-même

 

Des chercheurs américains et chinois ont mis au jour en Mongolie un gisement de fossiles de salamandres vieux d’environ 160 millions d’années. Deux cents spécimens de salamandres ont ainsi été découverts depuis trois ans, révélant l’extraordinaire proximité entre les salamandres d’aujourd’hui et leurs ancêtres, expliquent les chercheurs dans la revue Nature.

Ces amphibiens ont été fossilisés dans des dépôts volcaniques datant du jurassique moyen. Il s’agit des plus anciens urodèles connus selon les auteurs, Ke-Qin Gao et Neil Shubin.

La famille des amphibiens compte plusieurs ordres, dont les anoures (grenouilles) et les urodèles (salamandres, tritons). Les deux chercheurs présentent l’une des nouvelles espèces qu’ils ont trouvées, baptisée Chunerpeton tianyiensis, une salamandre du type cryptobranchidé.

Les similarités morphologiques avec les spécimens actuels l’emportent largement sur les quelques différences qui existent. Les salamandres actuelles de ce type «peuvent être considérées comme des fossiles vivants dont les structures ont peu changé depuis 160 millions d’années» écrivent les auteurs en conclusion.

Bien qu’ayant survécu à des périodes d’extinction massive, les salamandres sont aujourd’hui menacées, comme les autres amphibiens. Pour différentes raisons –maladies, climat, pollution- les populations d’amphibiens sont en déclin sur l’ensemble de la planète.

 

Cécile Dumas,

Sciences et Avenir, le 27/03/2003.

 

Fossile de Chunerpeton tianyiensis.

(Mick Ellison et Kalliopi Monoyios)

 
"Darwin", (1974)
  Les crapauds partent du bon pied
Le crapaud commun est plutôt droitier, ainsi que les scientifiques italiens l'ont démontré. Le crapaud commun Bufo bufo rejoint les humains, les singes et certains oiseaux en montrant une préférence dans l'utilisation d'un membre déterminé: la découverte d'une telle préférence chez une créature située aussi bas dans l'échelle de l'évolution peut éclairer la façon dont les processus de latéralité ont évolué.

Le Docteur Angelo Bisazza et son équipe des universités de Padoue et Udine, assisté de deux physiologistes australiens, ont testé 24 crapauds en leur mettant un ballonnet sur la tête. Ils regardèrent ensuite quelle main serait utilisée pour enlever ledit ballonnet. Avec une majorité de 14 contre 4, les crapauds privilégièrent la main droite, les autres étant ambidextres. Dans le cas d'un groupe plus important de 46 spécimens, qui devaient retirer de leur museau un bout de ruban adhésif, 26 choisirent la patte droite, contre 10 pour la gauche, le reste étant ambidextre. Curieusement, le Crapaud géant (Amérique du Sud) ne montrait aucune préférence lors du test du ruban adhésif, mais en montrait une lorsqu'il était mis sur le dos et ensuite sous l'eau. Dans 15 cas contre 2, les crapauds roulèrent vers la gauche en utilisant leur patte droite pour se remettre à l'endroit. L'équipe a déclaré que c'était la première fois qu'une préférence latérale avait été mise en évidence chez les amphibiens. Les poulets sont aussi connus pour cette particularité.

Terrario Magazine N°7.

 

Une grenouille indienne en provenance des Seychelles

Une nouvelle espèce de grenouille découverte en Inde dans le Kerala témoigne des liens biogéographiques qui existent entre la péninsule indienne et les Seychelles. Anatomiquement et génétiquement, ce batracien se rapproche en effet de quatre espèces de grenouilles vivant aux Seychelles. Il constitue en fait l'ultime représentant d'une très ancienne famille de batraciens qui vivaient au temps des dinosaures, lorsque l'Inde et les Seychelles ne faisaient qu'un seul bloc.  

Des soins parentaux ... Au masculin!

Chez deux espèces de Microhylidae, dans les zones montagneuses de la Papuasie, les soins à la progéniture se poursuivent jusqu'après la métamorphose ...

Conscient d'un manque de nourriture ou de la trop grande recrudescence de prédateurs potentiels, le géniteur transportera ses jeunes grenouilles sur son dos, en des lieux plus propices à leur développement!

Source: Revue "Nature" 2002.

Une grenouille confirme la dérive des continents

La grenouille Nasikabatrachus sahyadrensis est une star: nouvelle venue parmi les 4 800 espèces connues, elle a imposé la création d'une nouvelle famille, dont elle est l'unique représentante. L'analyse de son anatomie interne ainsi que son ADN montre que cet animal indien partage des traits archaïques avec des grenouilles des îles Seychelles, situées à plus de 3 000 kilomètres de l'Inde... Une parenté qui confirme qu'en dérivant vers le nord, le sous-continent indien a formé un radeau où les espèces ont évolué en vase clos pendant des millions d'années.

P.G. Science et vie N° 1035

Décembre 2003.

La grenouille d'Inde, indice de l'évolution

Une nouvelle espèce de grenouille, dont l'existence témoigne de liens biogéographiques très anciens entre la péninsule indienne et les Seychelles, a été découverte dans le Kerala par deux biologistes, l'Indien S. D. Biju e le Belge Francky Bossuyt, qui ont décidé de créer pour elle une nouvelle famille, celle des nasikabatrachidés. Longue de sept centimètres, la nouvelle grenouille a été dénommée Nasibatrachus sahyadrensis, un des noms pour désigner les Western Ghats, montagnes qui constituent l'une des plus importantes zones de diversité biologique dans le monde, située le long de la côte occidentale indienne, où l'animal a été trouvé). D'après son anatomie et l'analyse phylogénétique de fragments de son ADN mitochondrial et nucléaire, ce batracien de couleur violette au corps boursouflé, aux pattes boudinées et au museau protubérant est le représentant d'une très ancienne branche de l'arbre généalogique des grenouilles, indiquent les auteurs de cette découverte, S. D. Biju et Francky Bossuyt. Ultime représentante de batraciens qui vivaient à l'époque des derniers dinosaures, il y a plus de 65 millions d'années, ce taxon est le plus proche parent de quatre espèces de grenouilles présentes encore dans les Seychelles, à plus de 3.000km. de l'Inde. Les ancêtres de ces grenouilles auraient vécu sur le Gondwana, super-continent qui a commencé à se diviser en plusieurs blocs, il y a 160 millions d'années, entre un continent réunissant ce qui deviendra l'Amérique du Sud et l'Afrique, d'une part, et un continent oriental qui s'est désintégré à son tour, d'autre part. L'Australie et l'Antarctique, voici 130 millions d'années, puis Madagascar, il y a 90 millions d'années,et, enfin, les Seychelles, il y a 65 millions d'années, se sont séparés de ce bloc.

Dossier BIOsciences N°18

Février-Avril 2004.

Les animaux ont pris la fuite

Même si elle peut paraître indécente, la question se pose: où sont passés les animaux ? Au Sri Lanka, un responsable du ministère de l'Environnement a annoncé mardi qu'aucun cadavre d'animal n'avait été retrouvé dans le parc national de Yala, au sud-ouest de l'île, zone la plus éprouvée par le tsunami. Pourtant, des centaines d'éléphants, des léopards et des mammifères vivent dans ce parc. Ces animaux ont-ils bénéficié d'un sixième sens pour s'enfuir et éviter la catastrophe ? Mieux vaut parler de septième, huitième ou neuvième sens. "Certains animaux sont sensibles aux champs électromagnétiques, d'autres à l'humidité ou aux vibrations terrestres...", explique Xavier Bonnet, chercheur au centre d'études biologiques du CNRS. Que des animaux aient anticipé la catastrophe n'a donc rien de farfelu. "Au Maroc, j'ai assisté à la fuite de grenouilles, serpents et lézards juste avant qu'une rivière sorte brusquement de son lit."

Les mammifères sont sensibles à des gammes sonores différentes des nôtres. Le tsunami déferlant moins vite que les ondes sonores, les animaux ont donc dû "entendre" quelque chose. D'autres, sensibles aux vibrations terrestres, ont pu ressentir la secousse du séisme qui avait précédé le tsunami. Toutefois, le commandant de l'équipe d'évacuation de la province d'Aceh, sur l'île de Sumatra, en Indonésie, a déclaré mardi que les cadavres d'animaux domestiques s'y mélangeaient à ceux des humains. Les bêtes du Sri Lanka ont eu plus de temps pour fuir...

Laure Noualhat, Libération,

Décembre 2004.

Les Péruviens préfèrent les grenouilles au Viagra

LIMA -Correspondance-

C'est une petite grenouille qui a donné l'alerte sur un marché de Lima. En trouvant la force de s'échapper du réfrigérateur dans lequel elle était enfermée, elle a attiré l'attention de policiers qui inspectaient le lieu. Ils ont ainsi trouvé 5 000 batraciens vivants -des Telmatobius-, prisonniers d'une épaisse couche de gélatine à l'intérieur d'une caisse en bois. Mille d'entre eux n'ont pas survécu à cette tentative de sauvetage express. Les autres ont été rapatriés dans leurs lagunes andines d'origine, entre 3 600 et 4 700 mètres d'altitude, bien loin de la capitale. Sans cette intervention policière, ces grenouilles auraient été jetées dans un mixeur, sans peau mais encore vivantes, avant d'être assaisonnées.

Depuis quelques années, le cocktail de grenouille est très populaire chez les Péruviens. Mixé avec du maïs, des racines, du miel, des oeufs ou du pollen, le jus en question aurait des valeurs curatives, mais aussi et surtout aphrodisiaques. Vendu en bouteilles et en fioles dans toute bonne droguerie de Lima (à 5 soles, soit un peu plus de 1 euro), le fameux cocktail est souvent réalisé sur les marchés sous les yeux d'adeptes impatients de boire la mixture qui leur permettra de retrouver leur jouvence sexuelle. L'effet revendiqué n'a certes pas été prouvé et tarderait à se manifester. "Mais quand cela vient, cela vient!", assure un utilisateur.

"Des hommes pensent améliorer leur virilité avec ce cocktail, alors que ses vertus n'ont rien de réel", affirme pour sa part Victor Choquehuanca, directeur de la santé à la municipalité de Lima. "Ce qui est vrai, c'est que ce type de grenouille a une puissance sexuelle supérieure à d'autres. Elle seule parmi ses semblables copule pendant quarante-huit heures", précise-t-il. Observant ce phénomène, des paysans auraient cherché à transmettre cette aptitude naturelle de l'animal à l'homme.

Une campagne a été mise en place pour informer les habitants des dangers de cette potion, tels que les infections en tout genre et les soucis gastriques. Pour M. Choquehuanca, c'est une question de santé publique. "Si les gens ont recours à ce cocktail, c'est qu'ils ont un problème, d'une nature ou d'une autre, reconnaît-il. Mais, au lieu d'aller dans des centres médicaux, ils veulent le résoudre avec ce genre de mixture. C'est cette habitude culturelle que l'on doit changer." Une habitude qui pourrait bien anéantir les grenouilles, désormais menacées par les nombreux contrebandiers qui continuent de miser sur la fructueuse croyance populaire.

Chrystelle Babier, Le Monde,

12 Juillet 2005.

Quatre trafiquants de grenouilles condamnés à Vesoul

VESOUL (AFP). Quatre pêcheurs de grenouilles ont été condamnés à des amendes par le tribunal de Vésoul jeudi, pour avoir revendu plusieurs milliers de batraciens à des restaurateurs et à des particuliers de la région.

Jugé pour avoir "exercé une activité artisanale sans immatriculation au répertoire des métiers", Jacques Aubry, ancien cuisinier âgé de 55 ans, a été condamné à 1.500 euros d'amende, dont 500 avec sursis. Son fils a écopé d'une amende de 1.500 euros dont 1.000 avec sursis et deux amis, coprévenus, devront payer respectivement 150 euros et 750 euros dont 300 avec sursis. Le matériel utilisé pour capturer les batraciens a été confisqué.

Les quatre hommes étaient accusés d'avoir pêché plusieurs milliers de grenouilles dans la région des "Mille-Etangs", dans les Vosges saônoises, entre 2002 et 2004. Repérés par un garde de l'Office national des forêt, ils avaient été placés sur écoute de février à mai 2004 puis avaient fait l'objet de perquisitions, qui avaient abouti à la saisie de 65 nasses à grenouilles (pièges) et à leur mise en examen.

Le principal prévenu, Jacques Aubry, avait reconnu avoir pêché entre 8.500 et 10.000 grenouilles, qu'il revendait entre 23 et 32 centimes d'euros l'unité, selon qu'elles étaient dépouillées ou non. "Aller pêcher des grenouilles, c'est mieux que de brûler des voitures", s'était-il défendu à la barre.

Son avocat, Me Lassus-Philippe, avait fait valoir qu'"il n'y aurait pas de pêcheurs de grenouilles s'il n'y avait pas de restaurateurs, et pas de restaurateurs sans consommateurs."

Les trois autres prévenus avaient nié les faits. Le parquet avait requis des amendes de 2.000 à 3.000 euros avec sursis et la confiscation du matériel.

Le nouveau MACADAM

Janvier 2006.

Coller et décoller un adhésif comme les pattes d'une grenouille

Alors qu'il revenait de promenade, l'ingénieur suisse Georges de Mestral eut toutes les peines du monde à ôter les fleurs de chardons accrochées à son pantalon et à la fourrure de son chien. Ainsi inventa-t-il en 1948 le ruban autoagrippant, ou Velcro.

Pour les créateurs d'adhésifs, les animaux prirent ensuite le relais. Le dessous des pattes du gecko et de certains scarabées, experts en crapahutage sur surfaces lisses et sèches, a récemment inspiré la mise au point de produits non collants, fondés sur le principe de la ventouse. La moule, qui sécrète des protéines capables d'adhérer pratiquement à toutes les surfaces, a donné naissance à une colle très puissante. Et c'est une grenouille arboricole qui, demain, nous offrira peut-être le ruban adhésif dont nous rêvons tous : celui qui se colle et se décolle à volonté, au lieu de finir sa vie, après une seule utilisation, au fond de la poubelle.

Lorsque vous retirez un adhésif classique d'une surface, vous observez, là où il se détache, la formation de déchirures qui restent dans le ruban et lui font perdre son pouvoir d'adhésion. Comment la grenouille tropicale Litoria infrafrenata résout-elle le problème ? Non par sa lèvre inférieure, complètement blanche, qui la distingue de ses cousines batraciennes, mais grâce à l'extrémité de ses "doigts". Une extrémité qui ne se contente pas de sécréter un fluide adhésif, mais qui contient de microscopiques motifs en creux démultipliant les points de contact avec le sol et en facilitant le décollement.

En s'inspirant de ce principe, Abhijit Majumdere et ses collègues sont parvenus à mettre au point, à l'Indian Institute of Technology de Kanpur, un nouvel adhésif. Sa composition : un matériau mou et élastique, truffé comme un gruyère de microcanaux au diamètre rigoureusement étudié.

"Emplis d'air ou d'huile, ces canaux augmentent l'adhésion de l'ensemble d'environ trente fois, et empêchent la formation des déchirures et des surfaces de stress dues aux forces capillaires", expliquent les chercheurs dans la revue Science (12 octobre). Notamment grâce à la juxtaposition d'une couche de canaux emplis d'huile et d'une couche de canaux emplis d'air, qui permet au matériau de se décoller sans dommage.

Ces recherches, encore expérimentales, pourraient aboutir à la création de revêtements aux propriétés adhésives réversibles. Façon tout humaine de concurrencer les prouesses de la petite grenouille à bouche blanche, qui saute de branche en branche sans jamais en tomber pour peu qu'un seul doigt de ses pattes soit en contact avec le bois de l'arbre.

Catherine Vincent, Le Monde,

21-22 Octobre 2007.

Crapaud arthritique

La conquête de l’Australie par le crapaud-buffle sud-américain, où il a été introduit en 1935 pour lutter contre les insectes de la canne à sucre, pourrait être freinée par l’arthrite qui lui ronge les articulations des pattes, selon Rick Shine (université de Sydney). Le biologiste a constaté que la colonisation du continent par cet animal, fléau envahissant, était emmenée par des individus qui avaient des plus grandes pattes que la normale. En y regardant de plus près, il a remarqué que 10 % des crapauds aux grandes cuisses ont de l’arthrite. L’animal, normalement sédentaire, paierait ainsi un tribut à son adaptation à un environnement où il doit se déplacer sur de longues distances pour se nourrir. Les chercheurs tentent à présent de déterminer si cette maladie, qui le contraint à faire des petits sauts, stoppera sa course.

Libération, 30 Octobre 2007.