Insolite...

 

Le plus petit lézard du monde...

Seize millimètres de long, c'est peu pour un lézard. Avec un gabarit pareil, on a de bonnes chances de passer inaperçu. C'est sans doute la raison pour laquelle le gecko nain Sphaerodactylus ariasae des Caraïbes, région étudiée pour sa biodiversité depuis des décennies, vient seulement d'être découvert par deux biologistes américains.

Sa description, publiée dans l'édition de Décembre du Caribbean Journal of Science, lui donne un droit d'entrée, et non des moindres, dans le livre des records: le nouveau venu est en effet le plus petit représentant des 23 000 espèces de vertébrés amniotes recensées à ce jour -autrement dit de l'ensemble des mammifères, oiseaux et reptiles.

Petits, les geckos le sont tous plus ou moins. Et ils sont nombreux! Sur les 3000 espèces de lézards que comprend le sous-ordre des sauriens, la famille des geckonidés regroupe à elle seule plus de 650 espèces. Peuplant de préférence les régions chaudes de la Terre, elle ne sont que six en Europe, parmi lesquelles trois sont présentes -et protégées- dans le midi de la France: le gecko verruqueux, le phyllodactyle d'Europe et la tarente de Mauritanie. Longue de 7 à 11cm, celle-ci laisse parfois poindre sa tête triangulaire de la fissure d'un rocher ou d'une vielle bâtisse. Nulle crainte à avoir: en dépit de sa peau inquiétante, recouverte de granulations et de tubercules, la tarente, dépourvue de venin, est totalement inoffensive pour l'homme.

Où qu'il niche, le gecko est un animal discret. Sous les tropiques, il s'abrite en général, tout le jour durant, dans un creux de roche ou sous un lit de feuilles. La nuit venue, il par en chasse sur la canopée des forêts. Guettant l'araignée ou l'insecte, il se faufile avec agilité sur les feuilles et le long des branches. Par tous les temps, à toutes les altitudes, sans jamais risquer de tomber.

Dans ses pattes, en effet, réside une force inouïe. Tout d'abord parce que ses quatre membres, comme chez la plupart des lézards, sont solides et bien développés. Mais aussi, et surtout, parce que les cinq doigts écartés que comporte chacune de ses pattes, qui semblent littéralement collés au sol, ont la faculté d'adhérer, avec une efficacité et une souplesse sans équivalent, aux surfaces les plus variées. Au coeur de cette performance: des organes adhésifs garnissant la face inférieure de ses doigts, sortes de ventouses constituées par des dizaines de milliers de soies groupées en lamelles.

Comment cette structure singulière permet-elle, en laboratoire, d'escalader une paroi en verre à la vitesse d'un mètre par seconde, tout en résistant dans la nature aux vents les plus violents, aux pluies les plus glissantes ?

L'équipe américaine de Kellar Autumn, au Lewis and Clark College de Portland, qui travaille depuis plusieurs années à résoudre ce mystère, a fini par trouver la réponse.

"Dans les années 1990, j'ai découvert que les geckos possédaient le système énergétique le plus économique dans le règne animal, qui leur permettait de se déplacer en moyenne trois fois plus vite que les animaux de même taille", précise-t-il. Pour mieux comprendre, le biologiste plonge dans l'infiniment petit. S'aperçoit que chacune de ses minuscules soies de kératine se termine elle-même par un pinceau d'un millier de brins en forme de spatule. Décide de décomposer, à l'aide d'une caméra ultra-rapide, la marche de la bête. Et met ainsi en évidence le mouvement exécuté lors de sa progression: les orteils largement déroulés en même temps qu'il pose sa patte, afin de laisser les poils s'aplatir de tout leur long, puis une légère reprise en arrière, de manière à ce qu'une quantité maximale de "spatules" entre en contact avec la surface du sol. 

Une force insoupçonnée

 

De même, les orteils sont-ils détachés progressivement, un peu comme on décolle un morceau de Scotch ou Velcro... Cette démarche adhésive élucidée, restait à en mesurer la force. Ce qui impliquait, en premier lieu, de mettre au point un capteur suffisamment sensible. L'obstacle levé, le résultat justifia l'effort: l'adhérence d'un seul poil se révéla dix fois plus grande que celle que Kellar Autumn avait prévue! Environ 200 micronewtons, soit une force capable, rapportée à l'ensemble des poils présents sur une patte occupant la surface d'une pièce de cinquante centimes, de soulever un enfant de deux ans!

Sphaerodactylus ariasae colle-t-il et décolle-t-il lui aussi ses pattes une quinzaine de fois par seconde, comme le font les geckos de Kellar Autumn ? Le minuscule animal, qui vit dans le parc national de Jaragua et dans l'île de Beata (île Heureuse...), en République dominicaine, n'en a rien livré. Mais ce qui est sûr, c'est que Blair Hedges et Richard Thomas, respectivement biologistes à l'université de Pennsylvanie et à l'université de Porto Rico, l'ont découvert de justesse. Comme ceux de multiples espèces animales et végétales peuplant l'archipel, les jours de ce gecko nain, en effet, sont probablement comptés -tant du fait de la destruction de son habitat que de sa taille même, qui le rend très fragile au-dessous d'un certain seuil d'humidité. La petitesse permet de vivre longtemps caché des hommes, mais elle n'a pas que des avantages.

Catherine Vincent.

Le Monde.

Machiavel au pays des animaux

Je pense donc je trompe: tel pourrait être l'adage de ces animaux capables d'induire leur prédateur ou leur partenaire en erreur. Cet art machiavélique suppose chez l'animal une aptitude à anticiper les comportements des autres et à planifier le sien en conséquence. soit une véritable intelligence des situations.

La nature nous offre d'innombrables exemples de leurres dont la complexité et la sophistication rendent à peine imaginable le fait qu'ils n'aient pas été conçus par une sorte "d'intelligence supérieure": le gecko à queue plate, qui imite parfaitement la texture des troncs où il se dore au soleil (...)

Ces techniques de camouflage ne sont pas les seuls procédés du leurre. Certaines espèces ont choisi l'aposématisme: elles arborent des couleurs très criardes qui indiquent le danger, comme les taches rouges et noires de la salamandre terrestre. D'autres utilisent le mimétisme, c'est à dire qu'elles se font passer pour une espèce toxique: le serpent-roi, parfaitement inoffensif, imite ainsi le serpent-corail, très venimeux (...)

La sélection naturelle adore le mensonge

Aucune de ces tromperies ne manifeste cependant l'intelligence de l'animal à proprement parler: il s'agit d'une forme d'adaptation particulière, par laquelle l'évolution a sélectionne "aveuglément" les phénotypes les mieux côtés pour la dissimulation. La tromperie proprement dite qualifie les manipulations volontaires qu'effectuent les animaux vis-à-vis de leurs congénères, de leurs proies ou de leurs prédateurs. Elle est surtout utilisée dans deux activités hautement stratégiques: la guerre et le sexe. (...)

 

Dossier BIOsciences N°4.

Août-Octobre 2000.

ENCYCLOPEDIE : HISTOIRE DE LEZARD

Le Lepidodactylus lugubris est une petit lézard de la famille des geckos qu'on trouve aux Philippines, en Australie et dans les îles du Pacifique. Or il arrive que cet animal soit aspiré par des typhons et retombe sur des îles désertes .

Lorsqu'il s'agit d'un mâle, cela n'entraîne aucune répercussion. Mais lorsqu'il s'agit d'une femelle, il se passe une adaptation bizarre qu'aucun scientifique n'a pu expliquer.

Alors que cet animal est bisexuel, c'est-à-dire fonctionnant sur l'union mâle-femelle, la femelle perdue seule sur l'île va connaître une modification de son mode de reproduction.

Tout son organisme se métamorphose pour pouvoir pondre des œufs non fécondés et pourtant viables. Les petits lézards issus de cette parthénogénèse sont tous des filles. Et ces lézards vont avoir la capacité de pondre de la même manière sans l'aide de la fertilisation d'un mâle.

Encore plus étonnant : les filles issues de la première maman ne sont pas des clones, il se passe un phénomène de méiose qui permet un brassage génétique assurant des caractères différents pour chaque petite lézarde.

Si bien qu'au bout de quelques années, l'île déserte du Pacifique se retrouve colonisée par une population de geckos uniquement féminine, parfaitement saine et diversifiée et capable de se reproduire toute seule sans la présence du moindre mâle.

Edmond Wells,

Encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu, Tome V.

 

Unique au monde, ce gecko reposait dans les réserves

Un des premiers conservateurs du Muséum, Polydore Roux, qui était parti pour les Indes en quête de spécimens pour enrichir ses collections, mourut au cours du voyage.

Alain Delcourt, qui était attaché de conservation dans les années 80, partit beaucoup moins loin, mais revint avec un trésor. Au milieu des années 80, en rangeant les réserves, il découvrit une sorte de gros lézard naturalisé, oublié depuis près d'un siècle, et dont l'allure générale l'intrigua.

L'animal ne figurait sur aucun des registres du Muséum, nul ne savait quand, et dans quelles conditions, il y était arrivé.

Il s'avéra bientôt que la bête, était unique au monde. Non seulement elle avait disparu de la surface de la Terre, mais personne, jusqu'alors, n'avait eu l'occasion de la décrire.

C'était un "gecko géant", une fois et demi plus gros que ses cousins de Nouvelle-Zélande auquel, en hommage à son découvreur marseillais, on donna le nom de hoplodactylus delcourti.

La bête était si rare et si précieuse que, lorsqu'elle fut "prêtée" à la Nouvelle-Zélande dans le cadre d'une exposition, celle-ci, considérant que le gecko géant faisait partie de son "patrimoine inaliénable", ne voulut pas la restituer au Muséum. Elle n'y revint qu'au terme d'âpres et longues négociations.

©Patrick.Box

 

 

La Provence, Février 2006.