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Avec le serpent et le rat, le crapaud est sans doute l'animal le plus infernal des bestiaires. Souvent considéré comme l'envers de la grenouille, dont il serait la face ténébreuse, il était autrefois censé intercepter la lumière des astres par absorption. La tradition populaire le représente comme une véritable poche à venin, capable de cracher dans les yeux de celui qui le tourmente.
Des croyances extraordinaires ont pour objet cet amphibien, telles les pluies de crapauds. Il arrive, en effet, vers la fin du printemps ou au début de l'été, après de fortes pluies, de voir le sol se couvrir d'une multitude de petits crapauds. De cette brusque apparition coïncidant avec la pluie, la crédulité populaire déduisit que les crapauds prenaient naissance dans les nuages ou résultaient de la fécondation de la poussière par les gouttes d'eau. En réalité, l'explication du phénomène est toute simple: la pluie fait sortir de leur retraite les petits amphibiens qui supportent mal la sécheresse!
Plusieurs études scientifiques portant sur les batraciens montrent que le crapaud est particulièrement résistant au jeûne; ses faibles besoins respiratoires lui permettent une survie prolongée. On a pu ainsi conserver vivants des crapauds privés de nourriture pendant une année. Cette extraordinaire résistance permet de comprendre pourquoi cet animal avait la propriété d'absorber les maladies, notamment le fièvre typhoïde. On le plaçait sous le lit des malades où il se gonflait en absorbant l'air empoisonné de la fièvre. En Provence, le crapauds était cuit avec de l'huile d'olive dans le four du boulanger afin d'obtenir une huile guérissant les fièvres malignes. Actuellement, les crapauds font encore l'objet d'utilisations médicales; les bouillons de crapauds possèdent, en effet, mille vertus thérapeutiques justifiant leur emploi varié. Symbole absolu du mal, le crapaud a joué un rôle important dans les cérémonies magiques. Les sorcières élevaient ces batraciens en troupeaux au bord des marécages. Lors du fameux baptême du Diable, elle les habillaient de tuniques de velours noir ou rouge, leur mettaient des clochettes aux pattes et les faisaient danser. Le Diable marquait les sorcières de son signe, une patte de crapaud au blanc de l'oeil. Les inquisiteurs reconnaissaient les suppôts de Satan à ce signe particulier. Les sorcières allaient jusqu'à se métamorphoser en crapaud, et l'on raconte que le Diable lui-même apparaissait sous cet aspect.
La peau de crapaud, ingrédient indispensable à la préparation de certains philtres magiques, jouait certainement un rôle hallucinatoire. Les glandes à venin présentes sur le dos du crapaud contiennent en effet une substance hallucinogène dont la formule est proche de celle de la psylocibine: la bufoténine. L'absorption de breuvage à base de peau de crapaud pouvait donc provoquer des hallucinations et conduire effectivement les sorcières au Sabbat*. D'ailleurs, les mixtures à base de crapaud sont encore utilisées actuellement par les jetteurs de sorts de diverses régions de France. En 1932, une sorcière fut condamnée par la chambre correctionnelle de Metz pour avoir fabriqué un philtre d'Amour dans la composition duquel entrait une bonne part de venin de crapaud.
*Cf. J. L. Brau, "Histoire de la drogue", Tchou, 1968
Z. Bianu
"La magie des animaux"
Hachette, 1978.
De la peau de grenouille pour les grands brûles...
Une technique bon marché, l'utilisation de la peau de grenouille pour soigner les grands brûles, devait être présentée au Neuvième congrès de Chirurgie Esthétique du cône sud américain, le 17 mai, à Porto Alegre. Selon l'inventeur de la technique, le chirurgien Nelson piccolo, l'hôpital de Goias utilise des peaux de de l'espèce Rana catesbiana depuis six ans comme production temporaire de la peau humaine dans le cas de brûlures graves. Ce type de peau a l'avantage de réduire le temps de cicatrisation à six jours contre les 20 à 30 jours du traitement traditionnel. Le traitement traditionnel est fait à base de peau de cadavres, de peau de parents des brûlés ou de peau synthétique.
La peau des grenouilles permet une convalescence plus rapide car elle est riche en antibiotiques, anti-inflammatoires et analgésiques naturels. Il faut environ 500 à 1000 peaux de grenouilles pour un traitement de 14 jours.
Dossier BIOsciences N°8.